La Kabbale est une forme ancienne de mysticisme hébraïque qui cherche à comprendre la nature de Dieu et de l'univers. Elle est profondément enracinée dans les textes sacrés juifs et a influencé une variété de traditions spirituelles à travers les siècles. Pour bien comprendre la Kabbale, il est essentiel de se familiariser avec ses concepts clés. Voici un aperçu de ces notions fondamentales :
Au centre du mysticisme juif de la Kabbale, les Sefirot occupent une place prépondérante. Elles sont conçues comme des émanations divines, à la fois comme des qualités et des forces à travers lesquelles Ein Sof, l'Infini absolu, se manifeste et interagit avec notre réalité.
Les Sefirot sont souvent représentées graphiquement sous la forme d'un diagramme connu sous le nom d'Arbre de Vie. Cet arbre, qui n'est pas à visualiser comme un arbre biologique, est plutôt un schéma organisé de dix cercles (chaque cercle représentant une Sefira) reliés par 22 sentiers. Il symbolise la manière dont l'énergie divine descend dans le monde et comment elle peut être également remontée, évoquant ainsi la dynamique entre le divin et le terrestre.
Chaque Sefira a ses propres caractéristiques, fonctions et symboliques :
Keter (Couronne) : Située au sommet de l'Arbre de Vie, elle est la source de toute énergie et représente la volonté divine. C'est le point le plus proche d'Ein Sof.
Chokhmah (Sagesse) : Elle symbolise le commencement de la pensée, l'inspiration initiale, le germe de toute création. C'est la première émanation active d'énergie après Keter.
Binah (Compréhension) : Elle est souvent associée à la maternité et à la structure. Binah est la capacité de comprendre les choses en profondeur, de donner forme et structure à ce qui provient de Chokhmah.
Chesed (Miséricorde) : Représentant la grâce, la bonté et l'amour, Chesed est cette énergie qui cherche à se donner et à s'étendre.
Gevurah (Rigueur) : Parfois appelée Din (jugement), elle est la force opposée à Chesed, représentant la discipline, la limitation et la justice.
Tiferet (Beauté) : Au centre de l'Arbre, Tiferet harmonise et équilibre Chesed et Gevurah. Elle symbolise la compassion et la vérité.
Netzach (Éternité) : Elle représente l'endurance, la persistance et l'ambition, la capacité à triompher des obstacles.
Hod (Gloire) : En contraste avec Netzach, Hod est la majesté et l'humilité, l'acceptation et la reconnaissance de sa place dans le grand schéma des choses.
Yesod (Fondation) : Elle est le canal à travers lequel les énergies divines s'écoulent dans le monde. Yesod est associé à la communication et à la connexion.
Malkhut (Royaume) : Le plus terre-à-terre des Sefirot, Malkhut représente le monde matériel, l'endroit où toutes ces énergies prennent forme physique.
La Kabbale, en tant que tradition mystique du judaïsme, s'efforce de jeter un pont entre l'incompréhensible et l'expérience humaine. Pour ce faire, elle utilise une série de termes et de concepts qui visent à guider le chercheur spirituel vers une compréhension plus profonde de l'essence divine. Au cœur de ces concepts se trouvent Ein, Ein Sof, Ein Sof Aur, mais aussi le Tohubohu et le Tsimsoum.
Avant toute existence, avant même l'émergence d'Ein Sof et le Tohubohu (le chaos primordial), il existait un état appelé "Ein", souvent traduit par "néant" ou "rien". Il représente un concept délicat, car même le néant, dans notre compréhension conventionnelle, est perçu comme "quelque chose". Dans la Kabbale, "Ein" symbolise une absence totale, un état de non-existence absolue qui précède la manifestation d'Ein Sof. Il s'agit d'une pré-réalité, antérieure à toute conscience ou forme.
Ce terme est directement tiré du livre de la Genèse, décrivant l'état initial de la création, un état de chaos et de vide. Avant que l'ordre ne soit instauré, avant que la lumière ne soit séparée des ténèbres, il y avait le Tohubohu.
Se développant à partir du néant, "Ein Sof" est littéralement traduit par "sans fin" ou "l'Infini". C'est la représentation de la Divinité dans son état le plus pur, encore non manifesté. Ein Sof est au-delà de toute compréhension, transcendant les mots, les formes et même la pensée elle-même. Il est la source primordiale et éternelle de toute réalité.
Là où d'autres traditions pourraient décrire Dieu comme le "Tout", la Kabbale va plus loin en utilisant le concept d'Ein Sof pour suggérer que Dieu dépasse même la totalité de la création. Il n'est pas simplement la somme totale de tout ce qui existe, mais plutôt ce qui transcende cette somme.
Avant que la lumière d'Ein Sof Aur ne puisse émaner, il a fallu le Tsimsoum, un acte divin de contraction. En se retirant, Ein Sof a créé un espace pour que la lumière puisse rayonner, permettant ainsi à la création de prendre forme.
Après Ein Sof et le Tsimsoum vient "Ein Sof Aur", ou "La Lumière de l'Infini". Cette lumière est la première émanation ou expression du divin, antérieure à la création des mondes et des Sefirot. Elle représente l'initiation de la manifestation d'Ein Sof.
Bien que désignée par le mot "lumière", il ne s'agit pas ici de lumière au sens physique, mais plutôt d'une métaphore de pureté, de clarté et d'illumination. Ein Sof Aur est cette étincelle divine originelle qui précède toute création concrète.
La Kabbale offre une perspective profonde sur la structure et l'essence de la création. Centrale à cette compréhension est la notion des Quatre Mondes, qui sont vus comme des émanations successives de la source divine, chacun ayant sa propre qualité et fonction. Ces mondes représentent une gradation, allant du plus pur et divin au plus matérialisé.
Atzilut est souvent considéré comme le monde le plus proche de la source divine. Dans ce royaume, la lumière divine est omniprésente et brille de la manière la plus pure. Il n'y a presque pas de distinction entre le divin et ce monde, car il est presque entièrement composé de la lumière d'Ein Sof, l'Infini. Atzilut est exempt de toute forme de matérialité. C'est le royaume où les Sefirot (les dix émanations divines) sont les plus manifestes et actives dans leur forme la plus pure.
En descendant de la pure lumière d'Atzilut, nous entrons dans le monde de Beriah. Alors que Atzilut est le monde de l'essence sans forme, Beriah marque le début de la création proprement dite. C'est ici que les premières notions de "choses" commencent à prendre forme, bien qu'elles soient encore principalement de nature éthérée. Les archanges, qui sont des représentants divins d'une puissance immense, résident en Beriah. Ils servent de médiateurs entre le pur divin et les mondes inférieurs.
Yetzirah est le troisième monde dans cette progression, et il est plus formé et défini que Beriah. C'est le domaine des anges, des êtres qui servent de messagers et d'exécutants de la volonté divine. Contrairement aux archanges de Beriah, les anges de Yetzirah ont des fonctions plus spécifiques et sont plus nombreux. Ils sont associés à des sentiments, des émotions et des actions spécifiques dans le cosmos.
Le monde d'Assiah est le plus concret des quatre. C'est le monde physique dans lequel nous vivons, un lieu de réalité tangible, d'action et d'expérience. Mais même dans cette matérialité, la lumière divine est présente, bien qu'elle soit voilée par la densité de ce monde. Assiah est également le domaine des actions humaines, où le libre arbitre est exercé et où les âmes sont mises à l'épreuve.
La Shekhinah est l'un des concepts les plus mystiques et poétiques de la Kabbale. Elle incarne la présence divine immanente, l'aspect de Dieu qui réside au sein de la création et qui est ressenti par les êtres humains. Là où Dieu est souvent perçu comme transcendant et éloigné, la Shekhinah est sa manifestation tangible, accessible et proche.
Associée à la féminité, elle est souvent vue comme l'aspect féminin de Dieu. Cette association lui confère des qualités de réceptivité, de compassion, de soin et de nurturance. Dans le schéma des Sefirot, elle est liée à Malkhut, le dernier des dix Sefirot, qui représente la réalisation et la matérialité du royaume divin.
Dans d'autres traditions, des divinités féminines ou des figures de déesses sont vénérées pour leurs qualités nourricières et créatrices. De manière similaire, la Shekhinah est cette essence divine maternelle qui englobe, protège et nourrit la création.
La réincarnation, ou "Gilgoul" en hébreu, est une idée fascinante et complexe au sein de la Kabbale. Elle suggère que les âmes ne vivent pas qu'une seule vie terrestre, mais reviennent à plusieurs reprises dans des incarnations différentes. Chaque vie est une occasion d'apprendre, de croître et de corriger (ou "tikun") les erreurs des vies antérieures.
Chaque âme a une mission ou un but, et parfois, toutes les leçons nécessaires ne peuvent pas être apprises en une seule vie. Ainsi, l'âme se voit offrir d'autres opportunités pour accomplir sa mission. La réincarnation est également liée à l'idée de justice divine, suggérant que les actions bonnes ou mauvaises trouvent une résolution à travers les cycles de la vie.
Tikkun Olam est un principe fondamental non seulement de la Kabbale, mais aussi de la philosophie juive dans son ensemble. Traduit littéralement par "réparation du monde", il suggère que le monde, bien que divinement créé, reste imparfait. Cette imperfection n'est pas une erreur, mais plutôt une invitation. Les êtres humains sont appelés à être les partenaires de Dieu dans l'acte continu de création.
En participant à Tikkun Olam, les individus s'engagent dans des actes de bienveillance, de justice, de charité et de soin envers la création. Qu'il s'agisse de grandes actions pour réformer la société ou de petites actions quotidiennes de bonté, chaque effort contribue à rapprocher le monde de son état idéal.
Le judaïsme, et en particulier la tradition kabbalistique, considère la langue hébraïque avec une révérence particulière. Pour les kabbalistes, chaque lettre hébraïque n'est pas simplement un symbole utilisé pour former des mots et des phrases, mais plutôt une entité sacrée détenant une puissance et une signification mystiques. Les lettres sont bien plus que de simples caractères ; elles sont le souffle, l'énergie et les outils de la création.
Le concept des lettres en tant qu'instruments de création trouve ses racines dans le récit biblique de la Genèse. Lorsque le texte déclare : "Au commencement, Dieu créa...", il est entendu que cette création s'est faite par la parole, par le verbe. Dans cette perspective, les lettres hébraïques, en tant que composants de cette parole divine, possèdent un pouvoir créatif. Dieu a utilisé ces lettres pour former le monde, et leur résonance continue de maintenir la réalité en place.
Chaque lettre hébraïque porte en elle une symbolique et une énergie particulières. Par exemple :
Aleph (א) : La première lettre de l'alphabet hébraïque est souvent associée à l'unité divine et au principe de commencement. Elle est silencieuse par elle-même, évoquant l'ineffable et le mystère.
Bet (ב) : La deuxième lettre, qui commence le mot "Bereshit" (Au commencement), symbolise la dualité, la maison (beth signifie maison en hébreu) et la manifestation.
Shin (ש) : Cette lettre est souvent associée au feu divin et à la transformation spirituelle.
Et la liste continue, avec chaque lettre portant ses propres mystères et significations.
Les mystiques de la Kabbale ont souvent médité sur ces lettres, les visualisant, chantant leurs sons et contemplant leurs formes et leurs significations. Ces méditations sont censées aider à élever la conscience, à se connecter à la source divine et à canaliser les énergies créatives présentes dans les lettres.
La Kabbale est une tradition riche et complexe, et ces concepts ne sont que la pointe de l'iceberg. Pour vraiment comprendre la Kabbale, une étude approfondie et méditative est nécessaire, souvent sous la guidance d'un enseignant expérimenté. Mais même une connaissance superficielle de ces notions peut offrir des aperçus précieux sur la nature de l'univers et notre place en son sein.
Yann LERAY @ 2023