Pour une raison qu’il nous est impossible de concevoir, Le Tout se contracta et créa un espace en lui-même, c’est le TsimTsoum. Cet espace était vide, sans forme, c’était le néant : le Eïn.
Mais ce vide faisait partie du Tout et contenait sa Lumière sans fin, engendrant le Tohu-bohu, le désordre primordial, le chaos : le Eïn Sof.
Puis La vraie Lumière se manifesta : le Eïn Sof Aor.
Ce fut le commencement de la création tel que nous le livrèrent les kabbalistes hébraïques. « Bereshit bara Elohim et hachamayim ve'et ha'arets ». Pouvant se traduire par « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre » (les lettres hébraïques nous offrant bien plus d'interprétations).
Par la suite, le Zain, l’éclair ou le glaive de Dieu, lien qui relie le haut et le bas, traversa les 10 vases, les 10 séphiroth. Mais à part les trois premiers, ceux-ci ne purent résister à cette tension extrême et volèrent en éclats.
Le mouvement de la réparation de ces vases, appelé Tikkoun, appartenant maintenant aux Hommes.
Ainsi, au travers de la Kabbale et ses différents ouvrages comme le Sépher Yetzirah ou le Zohar, il nous est présenté une vision de la création qui est partagée, sous des angles différents, par d’autres philosophies ou cosmogonies.
En Hermétisme, qui s’attarde sur le symbolisme qui relie les pensées et philosophies gréco-romaines empruntées à l’Égypte antique, aux civilisations arabes et occidentales, nous pouvons y voir dans un premier temps, le principe de l’Unité qui se fractionne. Cette étape nécessaire et préliminaire à toute création est ainsi appelée dualité ou diabolum.
Cette séparation génère deux principes antagonistes, coupés l’un de l’autre, phénomène appelé le sexum.
L’un porte le nom de Hyle ou Energie de vie, et l’autre Chaos, ou Energie de matière. En alchimie, ils s’expriment sous les principes Nitre et de Sel primordiaux.
Ces deux notions fondamentales de la création, étant coupées l’une de l’autre et ne pouvant se réunir, se fractionnent à leurs tours et génèrent les quatre éléments.
L’Energie de Vie donnant naissance au Feu et à l’Air, et l’Energie de matière engendrant l’Eau et La Terre.
Enfin, en se recombinant apparurent les trois principes fondamentaux de l’alchimie, le Souffre, conjonction du Feu et de l’Air, Le Mercure, mariage de l’Air et de l’Eau et enfin le Sel, Union de l’Eau et de la Terre.
Par là même, tout ce qui existe dans notre Univers est composé de ces principes en des proportions différentes et se recombinent entre eux pour donner des formes nouvelles.
Cette loi des substances affirme que « Le Tout est dans tout et que tout est dans le Tout ».
Mais revenons aux quatre éléments.
La vision contemporaine aurait pour origine l’hypothèse de certains philosophes grecs et notamment d'Empédocle au Ve siècle av. J.-C., selon laquelle tous les matériaux constituant le monde seraient composés de quatre Éléments : La Terre, l'Eau, l'Air et le Feu.
Chaque substance présente dans l’univers serait constituée d’un ou plusieurs de ces Éléments, en plus ou moins grande quantité. Ce qui expliquerait le caractère plus ou moins volatil, chaud, froid, humide, ou sec de chaque matière.
Les philosophes présocratiques ont imaginé une essence première en toute chose. Thalès, le premier à chercher l'Élément premier, choisissait l'eau ; Héraclite voyait dans le feu l'élément premier à l'origine de toute matière ; Anaximène, lui, envisageait l'air comme essence de toute chose ; enfin, Empédocle, au début du Ve siècle avant notre ère, admit que les quatre éléments réunis composaient l'univers. Pour Démocrite, l'univers était composé d’« atomes » (en grec « a-tomos », signifiant « qui ne peut être coupé »), c'est-à-dire de particules microscopiques insécables et éternelles, qui composeraient la matière comme des briques forment un mur et qui auraient la forme générale de l'objet.
C'est à l’époque des croisades, au XIIe siècle en Terre Sainte, et de la Reconquista en Espagne, que le savoir des Grecs et la théorie aristotélicienne des Éléments a pénétré en Occident par l’intermédiaire des Arabes. Or, ces derniers ont essentiellement conservé dans leurs écrits l'enseignement d'Aristote. Celui de Démocrite s'est peu transmis. Les scolastiques du Moyen Âge reprendront cette théorie à leur compte et l’incluront dans leur vision chrétienne du monde.
Voyons maintenant plus en détail ces éléments qui représentent la dynamique de la création et donc du vivant :
Le Feu définit la connaissance, la Lumière, l’être ou Essen, ce qui est immanent et intangible. C’est le Monde Atziluth, celui de l’Émanation et de la Gnose. Voie Initiatique.
L’Air exprime l’intelligence, l’information, l’esprit, le Spiritus, ce qui est subtil et volatile. C’est le Monde Briah, celui de la Création et de la philosophie. Voie symbolique.
L’Eau représente le mouvement, les émotions, l’animation, l’Animus, ce qui est fluide et qui donne vie. C’est le Monde de Yetzirah, celui de la Formation et des arts. Voie écologique.
La Terre figure le travail, la résistance, la forme, le Corpus, ce qui est tangible et fixe. C’est le Monde d’Assiah, celui de l’action et des sciences. Voie scientifique.
Sans oublier le cinquième élément qui est l’union des quatre, la guérison du fractionnement, la réalisation du Tikkoun, la Quintessence. Car c’est à la croisée des chemins que naît le rose.
Riche de ces connaissances, il m’est impossible de ne pas faire un parallèle avec la cosmogonie égyptienne.
En effets, le premier panthéon de l’ordonnance de la création est caractérisé par la séparation du haut et du bas avec Nout et Geb, puis de Chou et Tefnout, respectivement principes du ciel, de la terre, du souffle et de l‘humide. L’union des quatre pris forme symbolique sous le nom d’Horus l’Ancien. Cette étape est à rapprocher du Monde d’Atziluth, le Feu.
Puis advint Osiris, Set, Isis et Neftis, principes de vie, de mort, d’ordonnance et de reliance, dont naquis la quintessence : Horus. Nous y trouvons une correspondance au Monde de Briah, de l’Air.
Enfin Horus eut cinq enfants : Douamoutef la Terre, Kébehsénouf l’Eau, Hâpi l’Air, Amset le Feu et Ib qui représente l’Unité des quatre. Descendances similaires au Monde de Yetzirah, l’Eau.
Il appartiendra à l’Homme éveillé de réaliser la quintessence en lui-même dans le monde tangible d’Assiah, la Terre, afin de devenir le sur-Homme, celui qui aura dépassé sa condition animale. Pour cela il pourra s’inspirer des enseignements d‘Horus en ayant préalablement rectifié ses parts corruptibles à l’image du pilier Djed redressé, purification du Kâ pour la libération du Bâ.
Il existe bien sur nombre d’autres correspondances, qui toutes nous portent à la compréhension du microcosme, comme du macrocosme et de notre place en ce monde. Certaines comme l’alchimie dans la quête de la Pierre Philosophale, dans la médecine holistique et sa Grande Médecine Universelle, dans la spiritualité dans sa recherche du corps de gloire et tant d’autres.
Cette perception symbolique de tout ce qui constitue notre Univers, visible ou invisible est ainsi devenue la pierre de fondement, la clé de voûte, de toute la pensée philosophique de nos civilisations, afin de nous guider sur le chemin du retour à l'Unité.
Yann LERAY @ 2023